La franchise en droit Camerounais: Un secteur en friche
Le secteur de la franchise au Cameroun souffre d’un manque de régulation spécifique, freinant ainsi son développement. Une législation claire est essentielle pour encourager les investissements.
Le paysage entrepreneurial est en pleine révolution en Afrique. L’expansion de la franchise est à l’origine de cette évolution économique. La franchise est un moyen de réitération commerciale qui met en relation le franchiseur et le franchisé dans un réseau de franchise à travers un contrat de franchise. Elle est un excellent levier économique pour les entreprises.
La franchise est définie par l’article 1 du code de déontologie européen de la franchise comme « un système de commercialisation de produits et/ou de services et/ ou de technologies, basé sur une collaboration étroite et continue entre des entreprises juridiquement et financièrement distinctes et indépendantes, le franchiseur et ses franchisés, dans lequel le franchiseur accorde à ses franchisés le droit et, impose l’obligation d’exploiter une entreprise en conformité avec le concept du franchiseur. Le droit ainsi concédé autorise et oblige le franchisé, en échange d’une contribution financière directe ou indirecte, à utiliser l’enseigne et/ ou la marque de produits et/ ou de services, le savoir-faire, et autres droits de propriété intellectuelle, soutenu par l’apport continu d’assistance commerciale et/ou technique, dans la cadre et pour la durée d’un contrat de franchise écrit, conclu entre les parties à cet effet ».
Le franchiseur transmet des procédures, des méthodes et des signes distinctifs pour permettre au franchisé de réitérer des éléments de réussite moyennant royalties et le droit d’entrée dans le réseau.
L’Afrique francophone est un marché en plein essor pour les franchises et le Cameroun n’est pas en reste. Tous les pays en voie de développement et développés font le choix de la franchise qui favorise le développement des entreprises et surtout accroit l’économie des pays. Malgré son potentiel, le secteur de la franchise au Cameroun reste en friche. La franchise est confrontée à des défis juridiques et réglementaires qui entravent son développement.
L’encadrement juridique de la franchise n’est pas consolidé par un texte spécifique. En droit Camerounais les règles encadrant la franchise sont éparses. De la formation à l’extinction du contrat de franchise, on recourt à différents textes pour la compréhension de cette opération ou mieux de la pratique courante entre les opérateurs. Le code civil Camerounais énonce les règles communes liées au contrat dont les conditions de fond et forme, l’obligation de garantie de vices cachés de la marchandise, l’obligation de bonne foi dans les pourparlers, la responsabilité civile pour dommage causé au cocontractant ; la loi camerounaise n°2015/018 du 21 décembre 2015 régissant activité commerciale qui présente les modalités de distribution dont l’obligation d’information précontractuel; l’Accord de Bangui portant organisation africaine de la propriété intellectuelle qui protège les signes distinctifs de ralliement de la clientèle tels que la marque, le nom commercial, dessin et modèle industriel… et surtout en ce qui concerne le droit de propriété littéraire et artistique qui protège le droit d’auteur et les droits voisins notamment le manuel opératoire ; l’Acte uniforme portant droit commercial général énonce l’enseigne comme un élément essentiel du fonds du commerce ; le règlement CEMAC de 2019 relatif à la concurrence qui vise à promouvoir la concurrence loyale et équitable, et interdit les ententes anticoncurrentielles. Il s’agit des textes qui encadrent le contrat de franchise de façon générale.
L’environnement Camerounais est teinté par la franchise mais avec une jurisprudence en la matière presque disparate dû à l’absence de réglementation spécifique. Ainsi, cerner la quintessence de la franchise, le déroulement de la phase précontractuelle, les obligations des parties contractantes, les types de franchise, les causes d’extinction du contrat, les conditions de formation spécifique au contrat, l’exécution du contrat de franchise, les clauses d’avant contrat et du contrat proprement dit, les modalités de preuve dans les opérations de franchise, le règlement du litige ... relèvent de la pratique constante et pour la plupart des textes étrangers notamment français. Le manque de réglementation spécifique entraine des risques de pratique abusive (à l’exemple de la concurrence déloyale, l’exigence le paiement excessif de redevances, le manque de transparence de la part du franchiseur); de mauvaise gestion (à l’exemple de la gestion inefficace des stocks et des approvisionnements, manque de soutien technique, paiement retardés ou non effectués aux fournisseurs) et décourager les investissements car les investisseurs recherchent un retour sur investissement élevé, une franchise sans vision claire ou mal gérée ne peut pas offrir cela.
Il serait nécessaire pour le législateur Camerounais de mettre au point un code déontologique de la franchise qui fixera les règles de bonne conduite entre franchiseur et franchisé et servira de base pour la rédaction des contrats de franchise. Ce qui encouragera les entrepreneurs à faire le choix de la franchise. Par conséquent, la franchise nécessite une réglementation adaptée pour garantir son développement au Cameroun.
Par Djuitchou Kamdem Lynda Claire : Doctorante en droit des affaires et de l’entreprise